Séance du 21 octobre
Satisfaits du déroulement de leur plan, les héros décident de poursuivre leur manœuvre. C'est cette fois Mishka qui joue les artificiers. Le gnome se saisit d'un petit tonnelet de feu grégeois, et allume une mèche courte. Il franchit discrètement l'épais rideau de velours, et fait quelques pas dans la salle inoccupée. Derrière une porte ouverte, il distingue des gobelins et hobgobelins qui affluent dans les couloirs en poussant de tonitruantes interjections. Sans attendre, le voleur lance son projectile explosif dans leur direction. Le tonnelet explose en une boule de feu incandescente, provoquant beaucoup de bruit et de fumée. Quelques pierres s'écroulent du plafond et des murs, bloquant momentanément le passage aux créatures. Mais cela ne les retiendra pas très longtemps. Peu après l'explosion, la terre se met à trembler d'une secousse plus violente que les précédentes. A n'en point douter, les héros se trouvent non loin de l'épicentre du phénomène tellurique. Earan suspecte la nature arcanique voire cosmologique de ce séisme. Les héros ne s'attardent pas. Ne sachant trop quelles menaces rodent à l'extérieur des ruines, et toujours sans nouvelles de Ninaran, ils conseillent à Tristan, Delphina et au paysan de Havrefroid de rester auprès d'eux, malgré le danger. Ces derniers, finalement convaincus par les arguments de Gorash, s'équipent comme ils peuvent puis suivent sans mot dire les aventuriers. De retour devant l'épaisse porte de pierre, Mishka utilise la clé dérobée au chef gobelin. Les rouages bien huilés et les contrepoids invisibles du mécanisme se mettent aussitôt en mouvement. Amour fait appel à sa force de Goliath pour faire pivoter la massive et pesante porte de pierre ainsi déverrouillée.
Un escalier raide et étroit s'enfonce dans les profondeurs des catacombes. Mishka et Amour referment la porte derrière eux. Malgré leur vision nocturne, les héros sont plongés dans l'obscurité. Même les yeux de drow d'Earan ne parviennent pas à s'accoutumer totalement aux ténèbres que la sorcière suspecte être de nature magique. La lueur de leurs torches offre aux compagnons une visibilité de quelques mètres à peine. Le groupe progresse lentement, Eleryl et Mishka en tête. Les catacombes forment un vaste dédale de galeries dont les parois sont creusées d'alcôves et de niches funéraires. Quelques uns de ces tombeaux sont encore scellés d'une plaque de pierre ou d'argile, mais la plupart sont ouverts et emplis d'ossements. Anciens guerriers du Cormyr, victimes de la guerre contre Shadraxil, ou bien simples ouvriers, artisans ou simple domestiques du fort qui ont péri de maladie, ou de l'accumulation des années: autant de sépultures qui retracent l'histoire mouvementée du Fort de Gisombre. Le sol est couvert d'une épaisse poussière qui même brassée retombe inexorablement au sol. L'odeur âcre de la chair en décomposition agresse les narines des héros. Malgré l'absence du moindre souffle d'air, un froid humide glace leur vêtements et leur sang. Certains pensent entendre des murmures, des chuchotements, des complaintes ou des pleurs, dont l'origine est incertaine ou irréelle. D'autres aperçoivent des formes blanchâtres à la limite de leur cône de vision, comme d'éphémères halos en mouvement. Une bifurcation, puis une autre. Les héros se dirigent au juger, puis s'arrêtent soudainement, apercevant quelque chose. Mishka s'accroupit pour balayer de la main la poussière sur le sol devant lui, et révèle les traces récentes de gravures taillées dans la pierre. Le gnome dégage peu à peu une glyphe complexe composée d'une deltoïde d'environ soixante centimètres de diamètre et de trois runes cunéiformes disposées entre ses branches. Earan et Eleryl en reconnaissent immédiatement la nature arcanique, et avancent même la thèse de la nécromancie. Mais aucun des deux lanceurs de sorts n'est familier de cette sombre discipline. La sorcière tente néanmoins de désactiver la protection magique sans grand succès. Le tieffelin se lance à son tour dans cette entreprise. Sans rituel de dissipation approprié, il tente malgré tout de mêler une gestuelle aussi complexe qu'élégante, quelques paroles mystiques, et une scientifique combinaison de poudres magiques. Les spectateurs sont conquit par cette démonstration artistique. Malheureusement le résultat s'avère également être un échec. A peine Eleryl a-t-il posé le pied sur la glyphe, qu'une silhouette fantomatique apparait devant lui. La forme spectrale a l'apparence d'une femme égorgée. Son cri strident remplit les catacombes. Les héros sont assourdis et pris d'une soudaine terreur incontrôlée. Le paysan et les deux enfants s'enfuient en hurlant, suivis à bonne distance par Gorash, Earan, Mishka et Eleryl. Seul Amour, faisant montre d'une volonté exceptionnelle, parvint à résister à la peur et entrer dans une rage barbare. La lame de son épée traverse le fantôme de part en part. La forme blanchâtre disparait aussitôt.
Sitôt après, des bruits de frottements et d'entrechoquement retentissent plus loin devant, résonnant à travers les catacombes. Amour part seul au devant de ce danger. Arrivé à une intersection, ils distingue plus nettement les sons de créatures qui arrivent des deux côtés. Le barbare s'engage dans la galerie de gauche. Il se retrouve rapidement encerclé de morts-vivants. Des squelettes armés de lames rouillées arrivent en premier à sa hauteur, bientôt suivis par des zombis en décomposition, plus lents. Les griffes des zombis lacèrent la peau du Goliath. L'une des créatures parvient même à étreindre le barbare, avec la volonté affichée de gouter à sa chair. Même si le barbare peut parfaitement comprendre ce sentiment, il préfère se dégager, au prix de quelques coups de représailles des squelettes. Les autres compagnons parviennent finalement à contrôler leur peur et à s'engager eux aussi dans la bataille. Mishka rejoint Amour, mais la configuration exigüe des galeries ne lui est pas favorable. Egalement privé de l'avantage de la surprise, le voleur est contraint à utiliser des passes d'armes rudimentaires. Gorash hurle aux enfants et au paysan de se tenir à l'écart, puis il invoque l'esprit de la panthère au milieu d'une intersection, bloquant ainsi le passage à un second groupe de morts-vivants qui arrive par le couloir de droite. Earan et Eleryl restent auprès du shaman et préfèrent attaquer à distance. La sorcière enchaîne décharges d'énergie occulte et explosions lumineuses sur de multiples adversaires. Ses sorts semblent être de plus en plus dévastateurs à mesure qu'elle parvient à toucher de nouvelles cibles. Ses adversaires semblent en outre particulièrement vulnérables à certains de ses sortilèges radiants. Les zombis tombent rapidement sous les coups des héros, mais les squelettes s'avèrent être des adversaires plus coriaces. Le Goliath encaisse un nombre exceptionnel de coups. Mais son endurance, sa peau de pierre, sa rage et les soins répétés de Gorash et Eleryl le maintiennent debout. Les autres héros ne sont pas non plus épargnés par l'agressivité des mort-vivants. Plusieurs créatures s'en prennent notamment au barde. La sorcière se fait lacérer par la lame rouillée d'un squelette en se frayant un passage jusqu'au voleur. Mishka profite de la tenaille offerte par cette dernière pour asséner un coup sournois à son agresseur. Les morts-vivants tombent les uns après les autres, et les héros sont une fois encore vainqueurs. Ils ont cependant subit de sévères blessures et n'ont pas la possibilité immédiate, dans l'environnement hostile des catacombes, d'y remédier autrement qu'avec des soins et invocations élémentaires. Ils savent que le temps leur est compté, et ils décident donc de continuer malgré leur état.
Les héros découvrent finalement la porte d'une vaste salle. Il s'agit en réalité d'un ancien temple de Séluné, déesse bonne mais chaotique de la lumière lunaire et des nuits étoilées. Dame d'Argent, Vierge Lunaire, Séluné est aussi la sœur jumelle de la maléfique Shar. La nef, reconvertie en mausolée, abrite aujourd'hui huit somptueux sarcophages de pierre sculpté à l'effigie des illustres guerriers du Cormyr dont ils renferment les dépouilles mortuaires. Le chœur du temple est surplombé d'un dôme étoilé qui diffuse une lumière argenté et une aura rassurante. Earan y décèle la présence d'une magie de protection. Deux autels se dressent de part et d'autre du chœur. Derrière eux, Gorash étudie des bas-reliefs et des inscriptions qui appellent à la prière. Mais c'est plutôt l'appât du gain qui y attire Amour et Mishka. Leur curiosité est récompensée et leur avarice assouvie car il trouvent dans un petit tiroir de l'autel des médaillons étoilés, semblables au symbole de la déesse. Earan identifie aisément la magie de protection qu'ils renferment mais suspecte également la présence d'un sortilège latent dont elle ne perce pas le secret. Les héros franchissent ensuite une lourde porte de pierre, semblable à celle qui fermait l'entrée-même des catacombes. Ce qui devait être initialement une chapelle ou une sacristie a été reconvertie en une crypte impressionnante. Les héros comprennent rapidement qu'il s'agit du tombeau de Sire Keegan. Des bas-reliefs sur les murs décrivent la vie et les exploits de l'ancien paladin. On le voit mener des armées, ériger le fort, combattre Shadraxil. Mais les dernières représentations montrent un homme pris de démence qui, à la fin de sa vie, retourne son épée sainte contre ses propres lieutenants et sa propre famille, avant de se donner lui-même la mort. Au fond la pièce, sur une large estrade, repose majestueusement un remarquable sarcophage de pierre portant la représentation sculpté du feu chevalier. Un tel spectacle impose peut-être aux héros un respect suffisant à leur faire recouvrer une certaine étique ou un certain code moral. A moins qu'ils ne craignent simplement de quelconques représailles. Quoi qu'il en soit, ils se refusent d'un commun accord à piller la tombe, et s'apprêtent à laisser le gisant reposer en paix. A peine ont-ils tourné les talons, que la lourde porte de pierre se ferme à la volée dans un vacarme assourdissant. Dans l'instant qui suit, le couvercle du sarcophage bascule brusquement et tombe sur le sol en gras fracas. En émerge la silhouette terrifiante mais bien réelle d'un chevalier squelette en armure. Aucun doute possible pour les héros. Malgré les siècles, malgré la mort, Sire Keegan se tient devant eux.
jeudi 29 octobre 2009
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